Contribution numérique : cultures et savoirs

Plateformes contributives culturelles : un observatoire

Plateformes contributives culturelles : un observatoire

Marta Severo

Benjamin Barbier

Sébastien Schulz

Marta Severo, Benjamin Barbier, Sébastien Schulz, « Plateformes contributives culturelles : un observatoire », dans Marta Severo, Roch Delannay (dir.), Contribution numérique : cultures et savoirs (édition augmentée), Les Ateliers de [sens public], Montréal, 2024, isbn : 978-2-924925-29-4, http://ateliers.sens-public.org/contribution-numerique/chapitre1.html.
version 0, 15/06/2024
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Introduction

De nos jours, quand nous pensons à la participation des utilisateurs sur internet, nous pensons principalement aux formes de création et interaction proposées par les médias sociaux et les plateformes commerciales. Des plateformes telles que Facebook, Instagram et YouTube sont considérées comme les principaux lieux de sociabilité, d’interaction, ainsi que de mise en avant de soi et de ses productions. Cependant, ces outils récents représentent seulement une partie du phénomène. Même s’ils attirent des millions d’utilisateurs, il ne faut pas oublier que le numérique offre de nombreuses autres formes de participation et construction des savoirs – pas toujours orientées vers la monétisation des données des utilisateurs.

Dans le domaine de la culture, depuis les années 1990, le web collaboratif, à travers les blogs, les wikis et d’autres dispositifs, a offert une infrastructure propice à la création de nouvelles formes de coopération entre utilisateurs. Des passionnés partageant leurs compétences autodidactes ont gagné en importance, utilisant des dispositifs comme Flickr, Wattpad et MySpace pour exposer leurs créations et découvrir celles des autres. Cette évolution technologique a été accompagnée d’un mouvement culturel qui valorise le partage et les pratiques contributives. Il trouve ses origines dans les pionniers d’internet et continue à vivre avec des projets collaboratifs tels que Wikipédia et OpenStreetMap. Des millions de volontaires à travers le monde ont contribué, et continuent de le faire, à ces biens communs numériques autogérés et accessibles à tous.

Plus récemment, le développement d’un tournant participatif, aussi dans le monde institutionnel et académique, a porté au déploiement d’autres outils participatifs visant à la collecte et à la co-construction des savoirs. Nous faisons ici référence principalement aux dispositifs de crowdsourcing émergés dans le cadre des sciences participatives. Ces plateformes contributives ont permis d’enrichir encore plus ce scénario en offrant des espaces où non seulement le contributeur peut s’exprimer, mais où il peut également acquérir des compétences et contribuer plus globalement à la construction des connaissances scientifiques. En France, ce mouvement a surtout été impulsé par le Museum national d’Histoire naturelle avec des projets comme Vigie-Nature ou Tela Botanica. Ces dernières années, de nombreux acteurs du monde culturel, tels que archives, bibliothèques et musées, se sont emparées de ces types de dispositif pour engager leurs publics dans la consolidation des savoirs liés à leurs collections.

Observatoire : Tela Botanica

Tela Botanica est un réseau collaboratif de botanistes francophones dont 80 % résident en France (plus de 60 800 inscrits en avril 2023). Il a servi de modèle au réseau d’entomologistes Tela Insecta, qui se développe en partenariat avec Tela Botanica.

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Comme pour tout phénomène récent, il est difficile d’avoir une vision globale et systématique du développement des plateformes culturelles contributives, c’est-à-dire de tout dispositif (institutionnel, commercial ou amateur) qui permet à un bénévole de contribuer à la co-construction des savoirs liés à des objets culturels. Pourtant, cette connaissance est aujourd’hui de plus en plus nécessaire pour comprendre l’ampleur de ce phénomène et en soutenir la croissance. Pour cette raison, dans le cadre du projet ANR COLLABORA dédié à l’étude de ces plateformes, nous avons construit un observatoire visant à répertorier un éventail large de ce type de dispositif. L’objectif n’était pas d’identifier tous les projets existants, mais d’en saisir l’importance et la variété, en privilégiant les exemples français, tout en prenant en compte des cas particulièrement intéressants venant d’autres pays.

L’observatoire

Ce chapitre vise à présenter l’observatoire des plateformes contributives culturelles et les 130 plateformes qui y sont contenues. Cet observatoireAu moment où nous écrivons ce texte, l’observatoire est également accessible en ligne.↩︎ a été mis en place à partir de novembre 2019 et il a été alimenté jusqu’en 2022. Du point de vue méthodologique, les plateformes ont été collectées à travers deux techniques. Un premier noyau a été identifié par les chercheurs du projet ANR COLLABORA à partir de leurs connaissances et de leurs réseaux préexistants. Ensuite, un formulaire a été ouvert sur le site web de l’observatoire pour permettre à des externes de faire des suggestions. Toutes les plateformes signalées ont été intégrées à l’observatoire à l’exception de projets qui n’avaient pas de volet participatif ou qui ne visaient pas à construire des connaissances – par exemple des plateformes uniquement de médiation n’étaient pas pertinentes pour le projet. Les plateformes proposées à travers le formulaire correspondent à 20 % du corpus.

Les projets récoltés dans l’observatoire peuvent être très anciens, le premier datant de 1994 (Grand Comics Database). La large majorité a été créée pendant les années 2010, avec deux pics en 2011 et en 2018 (Figure 1). Le volume réduit des plateformes après 2020 ne doit pas être interprété comme une perte d’importance du phénomène, mais il est simplement lié à la fin du projet.

Observatoire : Grand Comics Database

Le Grand Comics Database{link-archive=“https://web.archive.org/web/20240201195835/https://www.comics.org/}” (GCD) est une organisation à but non lucratif, basée sur Internet, de volontaires internationaux qui se consacrent à la création d’une plateforme avec una base de données ouverte qui recueille les couvertures des bandes dessinées imprimées à travers le monde.

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L’observatoire a aussi pris en compte des dispositifs qui aujourd’hui ne sont plus actifs, mais qui ont joué un rôle important dans le passé. Des 130 plateformes, 35 sont aujourd’hui inactives soit parce que la campagne participative est terminée, soit parce que les créateurs ou les contributeurs ont perdu intérêt dans le projet.

Figure 1. Courbe temporelle de dates de création des plateformes

Une grille d’analyse a été construite de manière collaborative à travers un focus group auquel tous les membres du projet ont participé (avril 2019). Cette grille est structurée autour de trois axes principaux : la structure organisationnelle de la plateforme (objectifs, porteurs, partenaires, financeurs, institutions concernées, etc.), la contribution sur la plateforme (contributeur visé, conditions de contribution, niveau de participation, caractères des profils des contributeurs, nombre des contributeurs, tache de la contribution) et l’infrastructure technique (type et statut des données produites, couverture géographique et chronologique des données, consultation et téléchargement des données, modalité d’accès, présence sur les réseaux sociaux, type d’infrastructure technique). Pour chaque plateforme, la grille a été remplie sur la base d’une analyse ethnographique et fonctionnelle du dispositif, ainsi que sur la lecture de la documentation disponible. Parfois, un contact a été établi avec les gestionnaires de la plateforme, mais qui n’a pas toujours été fructueux.

En bref, la grille vise à mettre en évidence, par le biais d’une fiche très détaillée, les thèmes, les sujets, les éléments innovants et l’organisation fonctionnelle de chaque dispositif. De cette manière, cet observatoire consiste désormais dans une base de données qui permet de produire une définition opérationnelle de plateforme contributive culturelle à travers l’analyse quantitative et qualitative d’un corpus de dispositifs par rapport à une série de paramètres prédéfinis.

C’est quoi une plateforme contributive culturelle ?

Le terme « plateforme contributive culturelle » englobe une multitude de dispositifs permettant au citoyen numérique de partager en ligne ses connaissances, ses créations et ses récits. Cette notion fait référence à une variété de plateformes, depuis celles où des artistes amateurs présentent leurs œuvres numériques jusqu’à des projets institutionnels ou scientifiques de transcription et d’annotation de manuscrits. Le terme « culture » est utilisé dans un sens large, englobant tous les éléments revêtant une valeur symbolique aux yeux des contributeurs, des domaines classiques comme le patrimoine et les arts jusqu’aux sciences et à la nature. Ces plateformes contributives partagent deux caractéristiques fondamentales. Tout d’abord, elles sont des foyers de production de savoirs culturels. En permettant aux citoyens de contribuer à une connaissance commune, elles acceptent une variété de contenus : annotations, récits, critiques, numérisations de documents, photos, etc. Les motivations de ces participants ne sont pas seulement sociales, mais reflètent également le désir de laisser une trace pour les générations futures et de partager des connaissances. Ensuite, ces plateformes engendrent une forme de contribution, selon le sens que Bernard Stiegler attribue à ce terme. Les contributeurs agissent de manière volontaire pour créer une valeur orientée vers le bien commun. En utilisant le terme « contributif », d’un côté, nous mettons en évidence le fait que la valeur produite sur ces plateformes n’est pas (entièrement) monnayable, contrairement aux plateformes collaboratives comme YouTube ou Airbnb. D’un autre côté, le choix de « contributif », par rapport à « participatif », met en avant le caractère ouvert de ces dispositifs, où chaque contributeur a la possibilité de jouer un rôle actif.

Ces plateformes reposent sur une multitude d’acteurs qui les fondent, les créent et les gèrent. Un premier groupe de plateformes, existant depuis près de deux décennies voire davantage, trouve ses racines aux débuts du web grand public. Créées par des internautes individuels ou des groupes informels avant l’essor des GAFAM, elles ont survécu grâce à l’implication inlassable de leurs initiateurs et aux vastes communautés de contributeurs qu’elles ont réussi à attirer. C’est le cas, par exemple, du Grand Comics Database, actif depuis 1994, Tric Trac, créé en 2000, ou de l’Encyclopaedia Metallum, lancée en 2002.

Observatoire : Tric Trac

TricTrac est une plateforme de partage de connaissances autour du monde des jeux de société référencés pour des publics amateurs. La plateforme est également un site d’actualité dédié aux jeux de société et reste l’un des meilleurs sites ludiques du web francophone. Le site dispose aussi d’une base de données complète sur les jeux de société qui est régulièrement mise à jour. En effet, plus de 15000 versions de jeux de société sont recensés sur la plateforme avec pour les internautes la possibilité de proposer une note ou un avis sur le jeu choisi. Du côté du classement, un système de multi-critère permet de retrouver les fiches des jeux les plus appréciés en fonction du type de jeu, du public visé et également de l’année de publication. Sur la plateforme, un forum de discussion est proposé dédié à la présentation des jeux de société, avec leurs règles, des suggestions liées au site, des conseils en matière de création de jeux, et des petites annonces.

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Observatoire : Encyclopaedia Metallum

L’Encyclopaedia Metallum est une plateforme contributive autour de la musique métal et de ses dérivés. Le site permet aux utilisateurs de trouver rapidement ce qu’ils recherchent grâce à une indexation à plusieurs facteurs, mais permet aussi de compléter les informations existantes. Elle est spécialisée dans la musique heavy-metal et liste les groupes de musique métal à partir de leur historique, leur discographie et leurs membres. La plateforme recense plus de 120000 groupes de métal répertoriés. La plateforme héberge les différents genre de métal qui sont en lien avec le heavy-métal avec à la fois des groupes connus mondialement mais également de groupes issus de la scène underground.

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Un deuxième ensemble de plateformes, plus ou moins récentes, a émergé au sein de projets institutionnels. Portées par des institutions culturelles, scientifiques ou des collectivités locales, ces plateformes visent principalement à contribuer au bien commun et à créer des dynamiques d’encapacitation auprès des citoyens. Parmi celles-ci figurent des projets historiques comme Wiki-Brest, lancé en 2006, rassemblant les connaissances autour de la ville, ou les Archives de la Vendée, qui proposent depuis 2003 des dispositifs de contribution liés à leurs collections.

Observatoire : Wiki-Brest

Wiki-Brest est un espace d’écriture libre, gratuit auquel vous êtes invité à participer. Wiki-Brest est un site Internet sur le patrimoine et le vivre ensemble : histoires de lieux, de personnes, de travail, géographie, tranches de vie, chansons, articles encyclopédiques, Wiki-brest c’est une écriture qui relie habitant·e·s, journaux de quartiers, associations, artistes, bibliothécaires, enseignants…

Les objectifs de Wiki-Brest :

  • Wiki-Brest est la valorisation d’un territoire et de ses acteurs

  • Développer la solidarité territoriale à l’échelle du Pays de Brest

  • Favoriser le lien social au niveau des quartiers et des communes à l’échelle du Pays de Brest

  • Développer l’appropriation des TIC par le plus grand nombre, notamment parmi les personnes les plus éloignées

  • Renforcer les coopérations, développer les réseaux.

Tâches attendues par les contributeurs : écrire un article ou en créer un nouveau est techniquement très simple et très rapide. Vos modifications seront instantanément visibles. Ce type de site web coopératif est appelé un wiki.

Tâches attendues de la part des contributeurs : créer des articles, proposer des articles, poster des photos

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Observatoire : Archives de la Vendée

La plateforme Archives de la Vendée est liée aux archives départementales de la Vendée qui assurent le contrôle, la collecte, le classement, la conservation, la communication et la valorisation des archives historiques. Elles conservent actuellement 30 kilomètres linéaires d’archives. La bibliothèque historique est constituée de plus de 25000 ouvrages et de plus de 2300 périodiques.

La plateforme en ligne repose sur plusieurs missions que sont : la conservation, la collecte, le classement et la communication des archives. Il s’agit également d’un outil lié à la numérisation de fonds d’archives en masse avec comme particularité de proposer un moteur de recherche destiné à consulter des instruments de recherche (inventaires et catalogues) et reposant également sur des thésaurus. Enfin plusieurs outils collaboratifs proposent des contributions fournies par le public : noms de Vendée, soldats de Vendée, congrégations de Vendée, dictionnaire des Vendéens, dictionnaire des toponymes de Vendée, dictionnaire historique des communes.

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Plus récemment, l’élan des sciences participatives a impulsé le lancement de nombreuses plateformes de transcription de documents issus de fonds publics, comme la plateforme By the people de la Library of Congress et celles de Testaments de Poilus gérée par les Archives Nationales.

Observatoire : By the people - Library of Congress

La Bibliothèque du Congrès a été lancée par le peuple (crowd.loc.gov) à l’automne 2018. L’application invite à transcrire, réviser et étiqueter des images numérisées de manuscrits et de documents dactylographiés provenant des collections de la Bibliothèque. Tout le monde est invité à y participer. Toutes les transcriptions sont faites et révisées par des bénévoles avant d’être retournées à loc.gov, le site Web de la Bibliothèque. Ces transcriptions améliorent la recherche, la lisibilité et l’accès aux documents manuscrits et dactylographiés pour ceux qui ne sont pas entièrement voyants ou qui ne peuvent pas lire l’écriture des documents originaux.

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Observatoire : Testaments de Poilus

Le projet Testaments de Poilus vise à produire une édition électronique d’un millier de testaments des Poilus de la Première Guerre mondiale retrouvés dans les fonds des Archives nationales et des Archives Départementales des Yvelines.  Il vise à rendre ces testaments accessibles au grand public et aux chercheurs, c’est aussi en permettre la lecture au plus grand nombre. Les internautes sont invités à transcrire le texte des testaments en déchiffrant les dernières volontés des Poilus. Afin que ces transcriptions soient lisibles en ligne et réutilisables par les chercheurs amateurs et professionnels, nous demandons aux internautes de baliser leur transcription avec un encodage informatique. Cela permet de proposer aux lecteurs deux versions du texte : l’une qui respecte l’orthographe et la mise en page d’origine, l’autre qui en propose une version corrigée, adaptée à la lecture sur écran et enrichie d’informations spécifiques (dates, lieux, structure du texte). Enfin, les connaissances des bénévoles sont sollicitées pour enrichir les notices des testateurs, des régiments et des lieux de bataille. Collecter et rassembler ces informations fait vivre la mémoire de soldats morts pour la France dans le cadre des commémorations du Centenaire de la Première guerre mondiale.

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Enfin, un troisième groupe regroupe des plateformes soutenues par des acteurs commerciaux. Celles-ci sont particulièrement intéressantes, car malgré leur objectif économique prédominant, les contributeurs qui y participent peuvent être motivés par des raisons plus altruistes et collectives. Par ailleurs, les acteurs commerciaux peuvent trouver des formes d’interaction avec des institutions ou avec les contributeurs qui visent à soutenir le contributif et vont au-delà du simple intérêt commercial. C’est le cas notamment de grandes plateformes telles que Geneanet, Babelio ou SensCritique. Pour elles, la rentabilité économique s’associe à des dynamiques de partage spontanées et désintéressées.

Observatoire : Geneanet

La plateforme Geneanet est une plateforme d’archives et de collectes d’informations dans le domaine de la généalogie. Les usagers de la plateforme sont principalement du grand public et des amateurs de généalogie. Développée dans les années 2000, la plateforme répertorie plus de six milliards d’individus et recense près d’un million d’arbres généalogiques, actes numérisés, cartes postales, photos de famille, états civils en France et à l’étranger. Les outils nécessaires pour accéder à cette base de données sont un moteur de recherche, un wiki, et un blog, lequel rend compte des actualités de la plateforme. En terme de soutiens financiers, la plateforme est financée essentiellement par les contributeurs via une offre Premium, et bénéficie de partenaires comme la Revue Française de Généalogie. Enfin, les données entrées sur la plateforme sont des textes et des images.

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Observatoire : Babelio

Babelio est une plateforme web et une application mobile consacrée à la littérature et un réseau social destiné à enregistrer des bibliothèques personnelles qui pourront ensuite être partagées et commentées par les autres utilisateurs. Le site fonctionne selon le principe d’une application web de catalogage social. Le site propose des extraits de critiques et des liens vers les chroniques littéraires parues dans la presse généraliste et spécialisée. Les chroniques sont intégrées dans la fiche bibliographique des livres mis en avant. Du côté de la participation des contributeurs, ces derniers peuvent pour des livres présents dans leurs bibliothèques donner une note, réaliser une critique, extraire un ensemble de citations, proposer des listes thématiques, participer à des jeux et créer également des quiz en ligne. Pour assurer la contribution, les internautes disposent d’une page d’accueil personnalisée qui présente un flux d’actualité en lien avec leurs intérêts et goûts littéraires.

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Observatoire : SensCritique

SensCritique est une plateforme qui permet de faire découvrir, de noter et d’écrire des critiques d’œuvres culturelles appartenant aux domaines des films, séries télévisées, livres, bandes dessinées (y compris mangas), albums et morceaux musicaux, et jeux vidéo. Ils mettent en avant le plaisir de la découverte culturelle par le bouche-à-oreille.

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La définition des plateformes culturelles contributives adoptée nous a amenés à exclure certains dispositifs, bien qu’intéressants, où l’engagement envers le bien commun par la production collective de savoirs culturels semblait moins prédominant. Cela est le cas des médias sociaux tels qu’Instagram, encourageant davantage la sociabilité, le réseautage et la construction algorithmique de relations sociales, plutôt que la production de savoirs. De même, des plateformes comme SoundCloud, qui offrent principalement une visibilité individuelle plutôt qu’un espace de production collective, ne sont pas incluses dans notre cadre.

Nous avons également écarté les plateformes culturelles dirigées par des institutions publiques ne permettant pas une contribution citoyenne effective, telles que l’Inathèque ou la base Joconde, plutôt définies comme des portails d’accès à des contenus numérisés publics. Enfin, nous avons dû opérer des choix parmi des centaines de plateformes qui auraient mérité leur place dans cet observatoire. Cela a conduit à l’exclusion de certaines plateformes d’archives, de critiques littéraires, de collectes musicales, d’annotations et de transcriptions pour la recherche participative, ainsi que de projets qui, bien que moins actifs aujourd’hui, ont joué un rôle significatif par le passé.

Des patrimoines à la nature : un large éventail de thématiques et d’acteurs

Les plateformes ont été catégorisées en six domaines thématiques principaux : Arts et littérature, Archives et histoire, Culture populaire, Patrimoine et tourisme, Musique et audiovisuel, Science et nature. Ce découpage vise à mettre en évidence la variété des objets culturels traités par ces dispositifs.

Figure 2. Distribution des plateformes par thématique et type d’acteur

La catégorie « Archives et histoire », la plus vaste avec 44 plateformes présentées, englobe des projets contributifs centrés sur les archives et les bases de données historiques. Ces dispositifs sont souvent créés par des institutions culturelles ou académiques, visant à enrichir leurs collections grâce à la retranscription ou à l’annotation de documents numérisés. Parmi eux, Transcribe Bentham, lancé en 2010 par l’University College de Londres, invite le public à transcrire en ligne des manuscrits inédits ou méconnus de Jeremy Bentham (1748-1832), précurseur de la philosophie utilitariste.

Observatoire : Transcribe Bentham

Transcribe Bentham est une initiative participative primée qui a été lancée en 2010 et qui est basée sur le projet Bentham de l’University College London. Son but est de faire participer le public à la transcription (ou dactylographie) en ligne de manuscrits originaux et non étudiés écrits par Jeremy Bentham (1748-1832), le grand philosophe et réformateur. Au dernier décompte, les bénévoles ont transcrit plus de 20000 pages des écrits de Bentham. La plateforme concerne également une collaboration à l’échelle mondiale : les internautes peuvent participer au projet en s’inscrivant sur le site. Le fonctionnement est organisé de cette manière : un manuscrit est choisi par la personne inscrite en fonction de la chronologie, de la difficulté ou de la thématique et celle-ci peut transcrire son manuscrit de Bentham. Une fois le manuscrit sélectionné, l’internaute est redirigé vers une interface où elle pourra commencer à transcrire.

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Des centaines de plateformes similaires ont suivi, dont certaines sont présentées dans cet ouvrage : Archives nationales participatives, By the people de la Library of Congress, Passports de la ville de Saint-Brieuc (s’appuyant sur Zooniverse), TACT - Transcrire Benoîte Groult, etc.

Observatoire : Archives nationales participatives

La plateforme Archives nationales participatives rend compte des projets collaboratifs de transcriptions, d’annotations et d’indexations en lien avec les archives nationales. Créées pendant la Révolution française, les Archives nationales conservent les archives publiques des différents régimes politiques qui se sont succédé, du VIIe siècle jusqu’à nos jours, ainsi que des archives privées et les minutes des notaires parisiens. La plateforme fait appel aux internautes pour participer à l’enrichissement de ses inventaires. Les projets participatifs visent à indexer et dépouiller des corpus de documents d’archives, à un niveau très précis, difficilement atteignable par les archivistes au regard du volume des fonds d’archives conservés. Les contributions sont intégrées aux inventaires. Elles sont interrogeables via le moteur de recherche, les contenus collaboratifs bénéficient à tous en permettant d’améliorer les résultats des recherches.

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Observatoire : Passports

La plateforme Passports est finalisée à l’indexation des passeports intérieurs delivrés par la commune de Saint-Brieuc entre 1850 et 1923. Les passeports intérieurs étaient nécessaires pour sortir d’un canton. À partir de la fin du XIXe siècle, suite à l’essor du chemin de fer, ils tombèrent en désuétude sans avoir été officiellement supprimés. Outre les informations sur les migrations et mouvements de populations, ils apportent de précieux renseignements aux généalogistes concernant leurs ancêtres, notamment leur description physique, ancêtre de notre photo d’identité. Leur indexation, par tranches de 10 ans, permettra de retrouver ensuite, sur la plateforme, les documents numérisés en interrogeant par nom de personne, lieu de naissance, date de naissance, profession, domicile et destination.

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Observatoire : TACT - Transcrire Benoîte Groult

TACT est une plateforme de transcription et d’annotation collaborative qui accueille des projets de recherche et permet à chacun d’apporter sa contribution ou de solliciter la communauté de la plateforme. Le projet «Transcrire Benoite Groult» a pour bout de transcrire tous les manuscrits de l’écrivaine, journaliste et féministe Benoîte Groult, qui sont actuellement conservés à la Bibliothèque universitaire d’Angers.

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Cette catégorie englobe également des projets de collecte de mémoires ou de témoignages liés à des documents d’archives, tels que Mémoire, porté par Ciclic, ou divers projets autour de la Grande Guerre.

Observatoire : Mémoire - Ciclic

La plateforme Mémoire est un site qui propose l’accès à une collection spécifique de films amateurs réalisés depuis les années 1920 jusqu’à nos jours. Les archives audiovisuelles diffusées sur la plateforme proviennent de la numérisation de supports originaux (pellicules et vidéos), collectés, conservés et valorisés par l’agence Ciclic Centre-Val de Loire (Agence Régionale du Centre pour le Livre, l’image et la Culture Numérique). Le site est accessible à tous les publics et offre un accès en ligne libre et gratuit de plusieurs milliers de films amateurs tournés sur les six départements de la région du Centre Val de Loire. Le projet a pour ambition de constituer et faire vivre une mémoire collective autour de l’histoire de la région et de l’ensemble de ses habitants à partir des contributions des internautes.

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La plupart de ces initiatives sont dirigées par des institutions culturelles (31), bien que des plateformes commerciales existent (Geneanet pour les généalogistes), ainsi que des projets plus modestes portés par des associations (Bulliot, Bibracte et moi dédié aux archéologues amateurs) ou des groupes informels.

Observatoire : Bulliot, Bibracte et moi

Bulliot, Bibracte et moi est une plateforme de transcription dédiée aux carnets sur la recherche archéologique sur le site celtique de Bibracte-Mont Beuvray. La transcription se focalise notamment sur les carnets de fouille (1867-1882) de Jacques-Gabriel Bulliot qui sont des documents scientifiques incontournables pour comprendre les débuts de cette nouvelle science, l’archéologie, et pour tous ceux qui travaillent et s’intéressent à Bibracte. La transcription des carnets sera ensuite mise en ligne sur la plateforme Persée en liaison avec les publications imprimées de Jacques-Gabriel Bulliot. Ces archives seront également intégrées à la médiation mise en œuvre au musée de Bibracte pour expliciter la chaîne opératoire de l’archéologie, dans une perspective historiographique concernant la découverte de la protohistoire européenne.

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La catégorie « Patrimoine et tourisme » comprend 31 dispositifs axés sur le patrimoine matériel et immatériel ainsi que la mémoire collective. Cette catégorie offre une grande variété en termes de contenu (patrimoine bâti, urbain, archéologique, oral, etc.) et de modèles de contribution. On y retrouve des plateformes similaires à celles des archives, telles qu’Europeana Transcribe, ainsi que des dispositifs où les citoyens peuvent partager des récits informels liés à leur patrimoine (ex. Nantes Patrimonia), ou des projets amateurs visant à préserver un héritage souvent négligé par les institutions (Histoires de Ch’tis). Cette catégorie englobe également des projets de valorisation patrimoniale à des fins touristiques, comme IZI Travel.

Observatoire : Europeana 1914-1918

La plateforme Europeana 1914-1918 permet aux utilisateurs de pouvoir découvrir des histoires, des films et des documents historiques de la Première Guerre mondiale, en plus d’accueillir des histoires familiales. La plateforme regroupe des documents de bibliothèques et des archives du monde entier en plus de souvenirs et de mémoires de familles issus de toute l’Europe. La mission de la plateforme est de construire un héritage culturel européen avec la possibilité pour les individus de le réutiliser dans un cadre professionnel ou pour leur culture personnelle.

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Observatoire : Nantes Patrimonia

L’un des principaux objectifs de ce futur outil Nantes Patrimonia est d’offrir aux personnes, quelles qu’elles soient, un espace numérique d’expression autour de la fabrique de la connaissance historique et des patrimoines (archéologique, architectural, industriel, maritime et fluvial, immatériel, archivistique, muséal). Véritable « encyclopédie vivante », ce portail numérique collaboratif patrimonial participera au partage et à l’enrichissement du patrimoine nantais, à destination du grand public. Au-delà des fonctions de découverte du patrimoine nantais, il intégrera également un large volet collaboratif.

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Observatoire : Histoires de Ch’tis

La plateforme Histoires de Ch’tis propose des témoignages destinés à faire découvrir et à redécouvrir ce qu’était la vie dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. Le projet repose sur la conservation de la mémoire collective de la vie des ch’tis et permet de publier des souvenirs des internautes intéressés par le sujet

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Observatoire : IZI Travel

La plateforme IZI Travel vise à connecter les villes, les musées et leurs histoires pour les voyageurs voulant explorer le monde d’une manière nouvelle et innovante : avec une plateforme globale, ouverte et gratuite. Le modèle repose sur le principe de Facebook et/ou Wikipedia.

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Ces plateformes ont des modèles économiques et des licences variés, mais la plupart sont portées par des institutions publiques (16) ou des associations (8), afin de mettre à disposition du public des contenus accessibles et libres de droits. Cette catégorie englobe également quelques initiatives individuelles ou collectives des citoyens (4) visant à valoriser leur territoire, comme Histoires de Ch’tis et Photos Normandie.

Observatoire : Photos Normandie

Photos Normandie est un projet collaboratif portant sur plus de 5000 photos et 300 films historiques de la bataille de Normandie (6 juin à fin août 1944). Il s’agit d’un compte Flick’r ouvert par Patrick Peccatte et Michel Le Querrec qui héberge des photos en lien avec le débarquement et les batailles de Normandie. La plupart des clichés photographiques existants sont issus du site des Archives Normandes 1939-1945 à l’initiative du Conseil Général de Basse-Normandie, de Coriallo, et de la bibliothèque municipale de Cherbourg-Octeville. Les photographies de l’album numérisées sont de très haute qualité et libres de droits, et témoignent des effets de la guerre sur la vie des Normands.

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La catégorie, « Science et nature », présente 17 plateformes contributives, principalement institutionnelles (11) qui s’éloignent quelque peu de la notion traditionnelle de culture, mais qui illustrent la diversité des domaines couverts par ces plateformes. On y trouve des projets tels que Les Herbonautes, qui invite les passionnés de biologie et de botanique à contribuer à des herbiers. D’autres projets de sciences participatives, comme Histoires de nature ou Oscahr, visent à produire et valoriser des connaissances scientifiques sur des objets culturels. Des projets plus atypiques, comme Open Food Facts, cherchent à créer une base de données sur le contenu des produits alimentaires à l’échelle internationale. Tous partagent l’objectif de générer des contenus scientifiques standardisés et privilégient des licences libres pour favoriser leur réutilisation.

Observatoire : Les Herbonautes

La plateforme Les Herbonautes propose de participer à la création d’une base de données scientifique à partir des millions de photos des plantes de l’herbier de Paris. Il s’agit d’explorer ces plantes et leurs étiquettes pour déterminer quand et où elles ont été récoltées. Les données trouvées sont des éléments précieux pour mieux connaître la biodiversité et mesurer et prévoir son érosion. La plateforme propose de contribuer à la création d’une base de données scientifique à partir des millions de photos des plantes de l’Herbier national. L’objectif de cette plateforme est de reporter toutes les informations d’identification présentes sur les étiquettes de chaque plante numérisée (lieu de récolte, date de collecte, etc.). L’herbier est organisé en « missions » qui comportent entre 250 et 5000 images de plantes, chacune choisie dans l’objectif de répondre à des questions scientifiques. Les données produites alimentent des bases de données scientifiques, comme Sonnerat, ou encore l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN) ainsi que les grandes bases internationales sur la biodiversité (GBIF).

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Observatoire : Oscahr - “Osons les sciences dans la culture, les arts et l’histoire”

Oscahr est une plateforme collaborative mise en ligne en 2017 par le Jardin des sciences de l’Université de Strasbourg. Cet outil de médiation numérique souhaite connecter un public élargi avec la recherche en train de se faire et valoriser une mise en perspective historique des savoirs. Accompagné d’une médiatrice, Oscahr propose aux citoyens, aux acteurs de l’éducation, de l’enseignement et de la recherche de mettre en récit collectivement des sujets scientifiques et patrimoniaux au travers de productions éditoriales multimédia. Des thématiques de société sont abordées en s’appuyant sur des données de recherche et en valorisant différentes formes de savoir dans une dynamique de co-création. Les fonctionnalités collaboratives d’Oscahr permettent ainsi de publier puis d’agréger, seul ou à plusieurs, des formats audio, billet, diaporama, vidéo, visuel, pour créer des dossiers et des parcours temporels/géographiques. Réalisées ponctuellement ou sur un temps long, les publications sont remobilisables librement sur la plateforme afin de créer des passerelles entre les disciplines et porter un regard renouvelé sur les savoirs.

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Observatoire : Open Food Facts

Open Food Facts est un projet de collaboration avec des contributeurs du monde entier. Le projet a été lancé par Stéphane Gigandet, créateur des portails de blogs alimentaires Recettes de Cuisine (français) et Very Good Recipes, et de divers autres projets collaboratifs et/ou liés à l’alimentation (principalement en français, par exemple Manger Bloguer et Informations Nutritionnelles). Stéphane s’occupe en particulier de l’architecture technique d’Open Food Facts, de son développement et de l’hébergement du site et de sa base de données.

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La catégorie « Culture populaire » regroupe 14 plateformes liées à différents aspects de la culture populaire, comme les bandes dessinées, les jeux vidéo, les séries télévisées ou les jeux de société. Ces projets attirent des milliers d’enthousiastes. Ils sont portés par une variété d’acteurs, souvent institutionnels (7), mais aussi associatifs ou informels, qui doivent trouver des sources de financement pour perdurer (ex. Grand Comics Database et Abandonware magazines). Ils peuvent aussi adopter des modèles économiques commerciaux, comme SensCritique, qui génère des revenus grâce à des contenus sponsorisés et à la publicité, ou des modèles hybrides où une partie du contenu est payante. Certaines plateformes, comme Abandonware magazines, sont autofinancées par les dons des passionnés qui y contribuent.

Observatoire : Abandonware magazines

Abandonware magazines est une plateforme dont le but est de recenser et collecter sous forme de scans les magazines traitant d’informatique et de jeux vidéo. Les contributeurs confient leurs scans de magazines sous format jpeg au gestionnaire de la plateforme qui les met en ligne et les intègre au catalogue de la plateforme.

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Dans le domaine de l’« Arts et littérature », nous avons regroupé deux types de plateformes (13). D’une part, celles qui permettent aux contributeurs de soumettre des critiques ou d’évaluer des livres, telles que Babelio ou Anobii. D’autre part, celles qui facilitent le partage d’œuvres originales, comme DeviantArt, la plus grande galerie d’art contributive en ligne. Contrairement aux catégories précédentes, ces plateformes sont principalement gérées par des acteurs commerciaux (6), ce qui limite la libre utilisation des contenus en raison de leur potentiel lucratif.

Observatoire : Anobii

Anobii est un site de catalogage social destiné à enregistrer et partager des bibliothèques personnelles et des listes de livres.

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Observatoire : DeviantArt

DeviantArt est une communauté artistique en ligne. Les contributeurs peuvent exposer ses propres créations graphiques et littéraires. Les contributeurs peuvent faire connaitre leur travail ou échanger avec les autres contributeurs/artistes.

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La dernière catégorie « Musique et audiovisuel » réunit 11 plateformes contributives. Certaines sont gérées par des organisations publiques (7) pour rassembler des créations audio, telles qu’Écouter le monde ou Locustream, tandis que d’autres sont le fruit d’acteurs privés, comme Radiooooo ou Genius Lyrics. Leur modèle économique repose sur l’accès payant à une partie du contenu, des récompenses en partenariat avec des entreprises commerciales, ou des liens sponsorisés. Ces plateformes génèrent des connaissances dans un domaine où les acteurs publics sont moins impliqués, attirant souvent des milliers voire des centaines de milliers d’utilisateurs.

Observatoire : Écouter le monde

Écouter le monde a pour vocation de raconter le monde par le son, écho vivant du quotidien, de nos territoires et de notre humanité. Au travers d’enregistrements de la vie ici et là et de créations sonores, cette plateforme se propose de collecter, d’éditer, d’archiver et d’exploiter un patrimoine sonore mondial. Le projet ambitionne ainsi de développer la pratique, le sens et le plaisir de l’écoute.

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Observatoire : Locustream Soundmap

Le projet Locustream est un réseau de microphones ouverts qui « streament » des environnements sonores, en direct et à partir de lieux parsemés autour du globe. La restitution est sous forme cartographique.

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Observatoire : Radiooooo.com

Radiooooo.com est une machine musicale révolutionnaire qui permet de voyager à travers le temps et l’espace ! Le fonctionnement est de choisir un pays sur la carte du monde, une décennie de 1900 à aujourd’hui. La plateforme permet d’accéder à des sélections musicales à l’échelle du monde.

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Observatoire : Genius Lyrics

Genius Lyrics offre un service de transcription et d’exégèse des textes musicaux principalement en langue anglaise.

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Des gros projets internationaux aux petites initiatives locales : chaque contributeur trouve sa place

La majorité des plateformes présentées dans l’observatoire est en langue française (65). Cependant, les aires géographiques et linguistiques couvertes sont très variables. Une cinquantaine de plateformes sont en anglais et une vingtaine sont disponibles en plusieurs langues. Ces dernières traitent généralement de sujets internationaux et elles sont gérées par des acteurs commerciaux (ex. Geneanet, Genius Lyrics, DeviantArt).

Concernant l’échelle géographique, si la majorité des dispositifs correspondent à des initiatives nationales (54), les projets internationaux (40) et locaux (36) sont nombreux eux-aussi. Évidemment, les plateformes nationales sont principalement françaises, mais certains projets concernent des pays francophones, comme la Suisse avec Notre Histoire ou l’Algérie avec 1000autres.

Observatoire : Notre Histoire

Votre histoire compte, celle que vous exprimez avec vos photos personnelles et celles de votre album de famille, vos vidéos et les films d’hier tournés en pellicule, des enregistrements et, bien sûr, vos témoignages. En les partageant, vous participez à un projet unique : faire vivre l’Histoire de la Suisse romande à travers votre propre histoire.

Ce projet rassemble des personnes, des associations et des institutions patrimoniales qui partagent leurs documents et leurs intérêts, échangent des commentaires, enrichissent de leur connaissance le contenu publié, animent l’activité éditoriale sous la conduite d’un Web éditeur secondé par un modérateur.

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Observatoire : 1000autres

La plateforme Alger 1957 - des Maurice Audin par milliers recueille et publie les notices individuelles de personnes disparues en Algérie de janvier à septembre 1957, dans le cadre de la disparition de milliers d’Algériens et d’Algériennes pendant la guerre.

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Nous avons aussi retenu des projets qui n’ont pas d’équivalent en France, comme la plateforme Ajapaik, dédiée au patrimoine photographique estonien, ou le projet Don’t Lose Your Way, qui a pour objectif de répertorier les chemins de randonnée oubliés du Royaume-Uni, ou encore CITiZAN, le réseau des zones archéologiques des côtes anglaises.

Observatoire : Ajapaik

Ajapaik est une plateforme d’hébergements de photographies qui montre comment les lieux ont changé au fil du temps. Depuis le début, en 2011, Ajapaik s’est concentré sur les images représentant des lieux et les tâches principales étaient la géolocalisation et la réimpression de photos. Depuis 2019, de nombreuses nouvelles tâches ont été ajoutées, liées à différents aspects du contenu de la photo. Par exemple, la détection des visages et le marquage de l’âge/du sexe, la détection des images doubles/similaires, la catégorisation des images, etc.

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Observatoire : Don’t Lose Your Way

La plateforme Don’t Lose Your Way vise à construire un plan des chemins et des routes qui risquent d’être oubliés en Angleterre et au Pays de Galles. Les contributeurs peuvent signaler les chemins, et leurs caractéristiques, qui seront ensuite intégrés dans le plan.

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Observatoire : CITiZAN

CITiZAN, le réseau archéologique de la zone côtière et inter-marées, est un projet primé et dirigé par la communauté qui lutte contre les menaces pesant sur l’archéologie côtière fragile en Angleterre.

Les tâches attendues par les contributeurs : identifier, enrichir et photographier les sites archéologiques. Recherches dans les archives pour améliorer les connaissances des sites.

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Enfin, nous avons pu identifier une trentaine de plateformes qui visent à produire des savoirs à l’échelle des régions ou des villes françaises, comme Wiki-Brest ou Nantes Patrimonia.

Figure 3. Distribution des plateformes par langue
Figure 4. Distribution des plateformes par couverture géographique

Un autre aspect intéressant est la taille de ces plateformes qui peut être évaluée en prenant notamment en compte le nombre de contributeurs. Les « petites » plateformes mobilisent quelques dizaines de contributeurs, les « moyennes », quelques centaines, et les « grandes » peuvent en compter des milliers, voire jusqu’à des millions. Le nombre de contributeurs n’est pas toujours un indicateur fiable du volume des contributions, car quelques dizaines d’utilisateurs peuvent créer une grande quantité du contenu. Cela peut être le cas de certains projets institutionnels qui peuvent compter sur des amateurs fidèles et actifs (souvent des personnes à la retraite) ; ou de projets amateurs informels ayant une longue histoire, et qui, au fil des années, ont pu fidéliser des contributeurs qui dédient une partie de leur temps libre au projet ; ou encore de plateformes institutionnelles dont le contenu est alimenté par des salariés. L’observatoire cherche à restituer la variété de cette activité, en répertoriant 45 plateformes de grande taille, 51 de taille moyenne et 34 de petite taille. Il est intéressant d’observer que, comme l’on peut s’y attendre, les plateformes qui récoltent des volumes plus importants de contributeurs hébergent des projets internationaux et les plateformes avec moins de contributions interviennent davantage au niveau local.

Figure 5. Distribution des plateformes par taille et couverture géographique

L’infrastructure sociotechnique de la contribution

La plateforme contributive culturelle peut être considérée comme une forme générique de plateformeVoir le chapitre de Cécile Payeur : « Généricité des plateformes culturelles contributives ».↩︎ qui présente certaines fonctionnalités nécessaires pour permettre à l’utilisateur de produire ou d’intervenir sur du contenu. À ce propos, nous pouvons observer que la majorité des dispositifs (89 sur 130) offre à l’utilisateur la possibilité de créer un compte. Généralement, le compte permet d’un côté à la plateforme de tracer la participation d’un utilisateur ainsi que de collecter certaines informations sur lui et, de l’autre côté, à l’usager de garder trace de son activité passée. Les fonctionnalités d’un compte peuvent être plus au moins avancées. Les plateformes institutionnelles tendent à réduire au minimum les informations associées à un compte ainsi que ses options de personnalisation (ex. création d’un profil). Au contraire, les plateformes commerciales tendent à offrir un large éventail de fonctionnalités pour rendre l’expérience de participation plus riche (construction de profil, création de liens sociaux, participation à des groupes, possibilité d’enregistrer des favoris, possibilité de construire des classements, etc.). Quelle que soit leur nature, la majorité des dispositifs (62 %) contient une charte d’utilisation définissant les droits et devoirs du contributeur (notamment par rapport à la vie privée et au droit d’auteur). Les sites sans charte sont des sites anciens ou avec une gestion amateure, ou encore avec un système de participation réduit (pas de création de contenu).

Concernant la validation des contenus, plus de la moitié des plateformes (78) prévoient la validation, par le gestionnaire, de tous les contenus publiés. Cette validation est principalement finalisée au contrôle de la qualité de l’information produite. Une partie des dispositifs (29) prévoit des outils de validation par les pairs, soit en tant que seul système de vérification du contenu, soit afin de réduire le travail de validation institutionnelle qui intervient après. Seules 23 plateformes publient directement les contributions des utilisateurs. À noter que cela est le cas pour de petites plateformes ou de gros dispositifs commerciaux qui peuvent intervenir a posteriori en cas de contenu ne respectant pas les principes juridiques ou éthiques de la publication en ligne.

Le fait d’identifier la plateforme contributive culturelle comme une forme générique de plateforme avec certaines propriétés récurrentes ne doit pas faire sous-évaluer la spécificité sociotechnique de chaque dispositif. En effet, si nous considérons l’infrastructure technique des plateformes de l’observatoire, nous pouvons voir que 36 % d’entre elles s’appuient sur des interfaces web ad hoc qui permettent d’alimenter des bases de données adaptées à l’objet de la plateforme. Pour le reste, Wordpress est le système de gestion de contenu le plus répandu (18 %) suivi par Drupal, Omeka et Zooinverse. Quelques plateformes s’appuient sur des systèmes wiki ou blog. Il faut noter que, si Wordpress peut être considéré comme une solution générique, ses potentialités très importantes de personnalisation (à travers les thèmes et les extensions) rendent chaque configuration unique.

Figure 6. Distribution des plateformes par solution technique

Enfin, plus de la moitié des plateformes étudiées (55 %) ne s’appuient pas uniquement sur le système de gestion de contenu où la contribution est hébergée, mais offrent aux participants d’autres espaces d’expression sur les médias sociaux, sous forme de page Facebook, de compte ou hashtag Twitter, de chaine YouTube ou d’autres solutions. Dans ce cas, l’étude du dispositif sociotechnique nécessiterait l’adoption d’une approche cross-médiaSevero, Marta et Céline Morin. 2023. « Designing Cultural Participatory Platforms as Multi-Space Environments : A Cross-Media Approach ». International Journal of Design Sciences & Technology, vol. 25, nᵒ2.↩︎ capable de saisir les circulations des acteurs entre ces différents espaces. Ce type d’analyse échappant la brièveté de ce texte, nous nous contentons de souligner la complexité sociotechnique de ces plateformes qui combinent une configuration générique adaptée à la création de la participation à des configurations particulières pensées pour les publics et les objets qui font la spécificité de chaque dispositif.

Les données entre ouverture et intérêts commerciaux

La participation créée par ces plateformes contributives génère des jeux de données qui peuvent avoir un statut très différent. Dans certains cas, les données produites sont l’effet du traçage du dispositif numérique, mais elles ne constituent pas le focus de la plateforme. Cela est par exemple le cas des dispositifs qui ne permettent pas à l’usager de créer ou modifier des contenus, dont l’action est limitée à des interactions basiques comme un like. Cependant, dans la grande majorité de cas (122 sur 130 dans notre corpus), l’objectif principal d’une plateforme contributive est la production de données qui sont rendues disponibles à la consultation des utilisateurs.

Le statut juridique de ces données hébergées et consultables sur ces plateformes est plutôt hétérogène. Presque la moitié des dispositifs étudiés (63) proposent des données « ouvertes », c’est-à-dire sous des licences permettant un libre accès. Par exemple, les organismes publics, comme le ministère de la Culture avec la plateforme #culturecheznous, sont tenus légalement de mettre leurs données à disposition en open data.

Observatoire : “#culturecheznous”

Nouvelle plateforme du Ministère de la Culture, la plateforme Culture chez nous réunit dans un seul site l’offre en ligne de près de 500 acteurs culturels, selon les catégories suivantes : Enfants, Art&patrimoine, Films&Vidéos, Spectacles, Audios, Livres&Savoirs, Jeux.

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D’autres plateformes, qui ne sont pas légalement contraintes, adoptent néanmoins des licences favorisant la libre circulation de l’information, comme l’Open Database Licence (comme Open Food Facts) ou des licences Creative Commons (comme Nantes Patrimonia). Une partie de ces plateformes (21) qui offrent des jeux de données ouvertes les proposent non seulement en consultation, mais aussi en téléchargement. Cela reste encore cependant une tendance marginale. D’autres plateformes protègent leurs droits d’auteur et considèrent leurs données comme « fermées », ne permettant que la consultation pour un usage personnel. Cela est souvent le cas des plateformes commerciales pour lesquelles les données des utilisateurs sont la principale source des revenus. D’autres projets encore ont des données « mixtes », combinant des éléments ouverts et fermés. Cependant, le statut légal des données n’est pas toujours clair, ce qui peut générer des ambiguïtés et des controverses, comme en témoigne l’exemple de Rap Genius (devenu Genius Lyrics).

Figure 7. Distribution des plateformes par statut des données

Contribution, pourquoi ? Création, mémoire ou production de savoir

Au-delà de ces éléments descriptifs, le défi de l’observatoire était de comprendre plus en profondeur le fonctionnement de ces plateformes. Pourquoi les contributeurs participent-ils ? Quel est leur objectif ? Quel est le type de contribution que le dispositif génère afin de répondre à cet objectif ?

Pour répondre à ces questions, nous avons procédé à une double catégorisation qualitative des plateformes en distinguant leur type de contribution et leur fonction. Concernant le type de contribution qu’elles offrent, nous avons pu identifier trois modèles proposés aux utilisateurs : la participation, la production partagée et la co-construction. La « participation » implique des tâches spécifiques basées sur des actions simples de l’utilisateur, telles que la notation ou le téléchargement de documents. La « production partagée » comprend des actions plus complexes, allant de l’annotation de documents au partage de contenus originaux pour des collectes mémorielles ou multimédias. Enfin, la « co-construction » permet aux utilisateurs d’intervenir dans le protocole de contribution, souvent à travers des wikis, des forums, des blogs ou des sites dédiés.

Au sujet de la fonction des plateformes, nous avons réduit la variété des objectifs à trois typologies principales : la création, la mémoire et la production des savoirs. En croisant la distribution par typologie et fonction, il n’y a pas nécessairement de corrélation directe entre le type de contribution et la fonction de la plateforme. De plus, en considérant la taille pour chaque fonction, on peut constater que des plateformes de différentes tailles se retrouvent dans différentes fonctions.

Les plateformes destinées à la « création » sont celles qui permettent aux utilisateurs de produire ou de partager des œuvres originales. Cela est par exemple le cas des plateformes commerciales comme DeviantArt ou IZI Travel. Ces plateformes sont généralement de taille grande ou moyenne et peuvent offrir un type de contribution très différent. Dans certains cas, comme IZI Travel ou Écouter le monde, la création s’appuie sur un dispositif de contribution limité qui ne permet aux usagers que de publier leurs oeuvres et de réagir à celles des autres utilisateurs. Dans d’autres cas, comme AudioCite ou LibriVox, la plateforme est un véritable espace de co-construction où les utilisateurs participent à la définition du fonctionnement du dispositif.

Observatoire : Audiocite.net

AudioCité est une association à but non lucratif ayant pour but de mettre à disposition de tous (en particulier des malvoyants et nonvoyants) des livres audio gratuits (en français), lus par des bénévoles, via son site Internet et son application mobile. AudioCite propose uniquement des contenus gratuits (en licences Art libre ou Creative commons). Elle propose plus de 4000 livres audio.

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Observatoire : LibriVox

La plateforme Librivox propose à des bénévoles d’enregistrer des chapitres de livres dans le domaine public, puis de remettre les fichiers audio sur le net gratuitement. Tous les fichiers audio sont dans le domaine public, ils peuvent donc être utilisés dans n’importe quel but. Les lecteurs sont libres de choisir les livres qu’ils souhaitent enregistrer. LibriVox se considère comme une bibliothèque de livres audio. Parce que les livres lus sont dans le domaine public, les lecteurs et auditeurs doivent être conscients que beaucoup d’entre eux sont très anciens, et peuvent contenir un langage ou exprimer des notions au mieux archaïques, au pire offensantes. Se porter volontaire pour LibriVox est facile et ne nécessite aucune expérience en matière d’enregistrement ou d’ingénierie audio, de jeu d’acteur ou de prise de parole en public. Tout ce dont il est nécessaire est de disposer d’un ordinateur, d’un microphone, d’un logiciel d’enregistrement gratuit et de sa propre voix.

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Les plateformes dédiées à la « mémoire » visent à collecter des informations pour les transmettre aux générations futures. Cette catégorie regroupe principalement des projets institutionnels ou associatifs, de taille moyenne et petite, dédiés à des événements traumatiques comme les guerres ou même la crise du COVID-19. Ces dispositifs prennent souvent la forme de plateforme de crowdsourcing pour faciliter une production partagée.

Enfin, la majorité des plateformes contributives de l’observatoire (76) ont pour finalité la « production des savoirs » autour d’objets assez variés, de fonds d’archives aux parcours de randonnée, du patrimoine local à la musique. Aussi, dans ce cas, la forme privilégiée est celle de la production partagée à travers des outils d’annotation et de retranscription. Cependant, on peut trouver un groupe significatif de dispositifs (14) qui mettent en place des espaces de co-construction. Cela peut être le cas de dispositifs wiki comme Wiki-Brest et WikiTopia Archives, des forums comme Encyclopaedia Metallum, ou des sites commerciaux comme Tric Trac.

Observatoire : WikiTopia Archives

WikiTopia Archives est un programme de numérisation des sources archéologiques mené par l’association ArkéoTopia®, une autre voie pour l’archéologie. Lancé en mars 2018, avec un premier corpus de lettres datant du XIXe siècle, le programme s’adresse aux particuliers amateurs d’archéologie et aux archéologues, aussi bien étudiants que chercheurs. Il a pour objectif de les encourager à numériser puis publier leurs sources historiques sur Wikimedia via les outils du Libre. Cette mise à disposition permettra aux divers documents d’être accessibles au plus grand nombre, partout dans le monde et d’encourager la recherche à leur sujet.

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Figure 8. Distribution des plateformes par fonction et type de contribution
Figure 9. Distribution des plateformes par fonction et taille

En somme, une approche fonctionnelle ou structurelle seule ne suffit pas à comprendre une plateforme. Il n’y a pas une tendance unique qui permet de décrire ce phénomène. Il est essentiel d’étudier l’histoire, les créateurs, les contributeurs et les publics de chaque plateforme pour en saisir la complexité. L’observatoire, à travers ses 130 fichesLes 130 fiches sont consultables sur le site de l’observatoire.↩︎, cherche à restituer cette complexité en explorant les motivations sous-jacentes de ces plateformes, leurs communautés et leurs modes de fonctionnement.

Conclusion

Derrière le terme « plateforme contributive culturelle » se cache une grande variété de formes de participation. L’observatoire que nous avons créé dans le cadre du projet ANR COLLABORA vise à restituer cette variété et à montrer comment les dynamiques de contribution hébergées par ces dispositifs (institutionnels, associatifs ou commerciaux) reflètent encore en partie le projet politique initial d’internet en faveur du partage. Ce projet politique se manifeste aujourd’hui à travers la montée des biens communs numériques, auxquels certaines de ces plateformes contributives s’apparentent. Les biens communs numériques réintroduisent dans le monde numérique des formes de propriété partagée et d’auto-organisation observées depuis des millénaires autour de ressources naturelles. Les communs numériques offrent une alternative aux logiques du marché et de la propriété privée d’une part et, de l’autre, aux logiques de l’État et de la propriété publique. Ils valorisent le pouvoir d’action des citoyens auto-organisés pour prendre soin de ressources partagées.

Dans le monde numérique, ce modèle de communs est incarné par des projets tels que Wikipédia ou certaines plateformes culturelles contributives mentionnées dans l’observatoire, comme Open Food Facts ou Wiki-Brest. D’autres projets, même s’ils ne correspondent pas exactement à ce modèle, adoptent des éléments caractéristiques des communs numériques : contribution, partage, auto-organisation. Dans un contexte où les internautes ont de moins en moins de pouvoir face aux décisions unilatérales des géants technologiques ou aux réglementations autoritaires, ces plateformes cultivent un modèle alternatif plaçant les usagers au centre, reconnaissant leur capacité à générer collectivement des objets culturels et des connaissances complexes au profit de l’ensemble de l’humanité. À travers cet observatoire, nous espérons illustrer la vitalité et la diversité des projets politiques d’internet qui existent en parallèle aux discours pessimistes sur la domination des géants technologiques et des États.

Contenus additionnels

Observatoire des plateformes contributives culturelles

Accéder au site de l’observatoire des plateformes contributives culturelles.

Crédits : ANR COLLABORA

Source (archive)

Notes prises lors du forum

Notes 1. Babelio : construire des synergies avec les acteurs publics

Pierre Fremaux (fondateur de Babelio)

Pierre Fremaux a présenté la manière dont la communauté de lecteurs en ligne autour de Babelio et l’historique de leur relation avec les bibliothèques publiques afin de voir comment un acteur privé collabore avec des entités publiques pour des projets passerelles. Il commence par rappeler l’histoire de Babelio, un projet qui débute en 2007 en s'inspirant de Myspace : « il y avait une communauté de partage autour de la musique, pourquoi pas en faire une autour du livre ». Quinze ans plus tard, la plateforme compte cinq millions de visiteurs et quelques dizaines de milliers de contributeurs actifs par mois, dont une grande partie de femmes. Cette contribution permet la constitution d’une base de données la plus riche possible qui s’appuie sur un système de recommandation personnalisée.

Pierre Fremaux expose ensuite deux modèles économiques. Le premier, qui est le cœur de l’activité économique, tient à sa relation avec les maisons d'édition. Ces dernières font appel à la plateforme pour la promotion de nouvelles parutions en profitant de leur large audience. Cette promotion peut relever de la publicité et du lancement du bouche-à-oreille sur internet, avec comme caractéristique de pouvoir cibler précisément le lectorat grâce à leur base de données. Le second modèle économique repose sur un abonnement annuel payé par les bibliothèques publiques. L’idée est de créer des passerelles entre la base de données Babelio et les catalogues des bibliothèques qui souhaitent les rendre contributifs. Le service Babelthèque permet aux usagers qui consultent un catalogue d’une bibliothèque partenaire d’avoir également accès à la base enrichie de Babelio, via des recommandations ciblées.

Suite à l’intervention, des questions ont été posées. Sur le risque que Babelio soit racheté par Amazon, Pierre Fremaux a répondu qu’il ne voyait pas cela comme un risque puisqu’un rachat ne signifiait pas une dégradation de la qualité du service. Il y a cependant un lien avec l’entreprise URB, prestataire d’Amazon pour la rédaction de notices des livres vendus sur la plateforme : Babelio récupère les notices moyennant la mise en place d’un lien renvoyant vers Amazon pour l’achat de l’ouvrage. Ceci étant dit, P. Fremaux a précisé que la grande majorité des usagers de Babelio achète leurs livres chez des libraires indépendants, bien que Babelio n’ait pas réussi à nouer des liens durables avec ces derniers. Enfin, il explique qu’ils réfléchissent à la possibilité d’une offre freemium mais avec la difficulté de faire payer un service qui a toujours été gratuit.

Notes 2. Économie contributive et plateformes numériques

Vincent Puig (directeur de l’IRI du Centre Pompidou)

Vincent Puig souhaite présenter les réflexions sur lesquelles il travaille à l’IRI tant sur un plan philosophique qu’économique. Il commence par rappeler les trois objets centraux d’intérêt à l’IRI : (i) Capacitation : comment construire une économie sur le « pouvoir d’agir » (Amartya Sen) permettant aux acteurs de développer leurs savoirs ? (ii) Amateurs : comment construire une économie du désir libidinale (Bernard Stiegler) où l’amateur, qui aime produire et souhaite savoir, devient une figure centrale ; (iii) Contribution : comment construire une économie de la contribution ? L’économie de la contribution cherche à redonner accès, dans le travail, à une alternance/intermittence entre des phases de contrainte (emploi) et des phases de libertés (artiste), qui sont complémentaires. Or ici, la question des biens communs est centrale, puisque, dans les logiciels libres, on voit apparaître cette question de l’intermittence : les développeurs de logiciels libres, qui s’adonnent à leur créativité, sont très recherchés en raison de leurs compétences.

Vincent Puig présente ensuite différents projets de l’IRI. Le premier projet est celui des territoires apprenants contributifs. L’idée est de s’inspirer du modèle de l’intermittence du spectacle pour faire alterner des périodes de capacitation (avec le versement d’un revenu contributif et des périodes de production rémunérée, le tout auprès de structures labellisées. Le second exemple est le projet « Urbanité numérique en jeu », permettant à des étudiants de contribuer sur le jeu Minecraft pour penser l’urbanité de leurs quartiers. Le troisième projet présenté est « contribalim » qui permet d’enrichir les connaissances et les savoirs sur l’alimentation. Le dernier projet présenté est celui d’une monnaie locale, inscrite dans un réseau complexe permettant aux habitants, entreprises, scientifiques et collectivités d’un territoire d’évaluer et mettre en œuvre la rétribution de la contribution.

La présentation se poursuit sur des questions. Elles concernent la monnaie locale, le montant des rémunérations ou encore la couverture sociale que permet le revenu contributif.

Notes 14. Modèles socio-économiques

Olivier Thuillas (maître de conférences, Université Paris Nanterre)

Olivier Thuillas est maître de conférence en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris Nanterre, laboratoire DICEN-idf (Dispositifs d’Information et de la Communication à l’Ère Numérique). Il étudie les plateformes contributives avec une approche socio-économique.

Il commence par exposer que, sur les plateformes qu’il a étudiées, il y a des modèles économiques qu’il a réunis dans une typologie qu’il va présenter.

  • Le premier consiste à avoir des formes de publicité. C’est le plus représenté. C’est le cas de Babelio, de FestView ou d’Anobii.

  • Le second modèle est celui du Freemium/Premium. Il s’agit d’une offre avec un accès limité d’un côté, et des contenus et services annexes en premium de l’autre. L’intervenant prend l’exemple de Geneanet, Radiooooo ou encore Babelio qui a développé un service pour les bibliothèques par exemple.

  • Le troisième modèle correspond au rachat de la plateforme par les entreprises. L’exemple donné est celui du projet Tric Trac qui a été acheté par une entreprise, car il a eu beaucoup de succès.

  • Le quatrième est celui de plateformes portées par des organismes publics ou semi-publics. Pour ces projets se posent les questions de la permanence du financement ou encore de la pérennité du porteur.

D’autres modèles sont présentés, comme les fondations, ou les particuliers passionnés qui subventionnent les plateformes, le crowdfunding, c’est-à-dire le financement participatif.

Olivier Thuillas termine en expliquant qu’il y a forcément des coûts de développement pour les plateformes numériques (maintenance continue, mise à jour, etc.). La question du financement se pose donc à chaque fois.

Notes 17. Généricité des plateformes

Cécile Payeur (maitre de conférences, Université Paris Nanterre)

Cécile Payeur expose une présentation sur la généricité des plateformes. Ce travail de recherche touche à la conception des plateformes, c’est une analyse comparative des plateformes recensées par l’observatoire des plateformes culturelles contributives de l’ANR. L’objectif est de réfléchir au phénomène de plateformisation et de chercher ce qui est commun entre les plateformes, en s’intéressant aux recompositions, recombinaisons et aux réarticulations des plateformes. Pour ce faire, l’enquête s’intéresse aux plateformes de critique culturelle. La recherche liste les fonctionnalités, essaie de trouver leurs points communs et s’intéresse à l'évolution (ou pas) de ces différents éléments. La notion de généricité renvoie à l’abstraction, aux motifs, aux générations d’outils. Les plateformes peuvent être porteuses d’innovation si elles peuvent être reprises et utilisées par d’autres.

Sur 80 plateformes, 30 % ont eu des développements spécifiques. 30 % passent par un CMS (ex. Wordpress ou OMEKA). 20 % des autres sont des outils de type wiki et réseaux sociaux, avec un point fort sur la notion de communauté.

Pour finir, deux questions sont posées. La généricité est-elle une force de la plateforme ? La plateforme doit-elle être pensée en tant qu’artéfact ou en tant que dispositif ?